Il parait que le Danemark a sorti il y a de ça quelques années une série que le monde entier s'arrache. Une série tellement excellentissime que les 'ricains n'ont pas su s'en empêcher et qu'ils en ont fait un remake. Et que ce remake ne serait pas si mauvais que ça.
Cette série, c'est The Killing. Ou Forbrydelsen en danois.
J'en avais entendu parler sans jamais y prêter grande attention jusqu'à ce que Maguth se pointe à la maison avec la première saison du remake US. Et tout ce que j'ai trouvé à dire fut "Ha. T'as pas pris la série originale suédoise?". Sympa, non? Déjà c'est danois en plus.
Soit. On reviendra plus tard sur mon grand manque de romantisme, de gratitude et de connaissance des origines profondes des séries nordiques.
Quoi qu'il en soit, c'est ce lundi dernier, vers 21.00 alors qu'il douchait dehors, que nous nous sommes installés devant la téloch pour juger de la chose. Et là, putain la claque qu'on s'est prise! The Killing, version US donc, est une tuerie absolue. La mise en scène, la lumière, la narration, mais aussi et surtout les acteurs - mais alors, quels acteurs! - tout est d'un niveau d'excellence rarement atteind, même pour un film. Cela faisait longtemps que nous n'avions pas été à ce point scotchés et ébranlés devant une série.
[Edit: en regardant un peu mieux sur IMDb, j'ai constaté que les producteurs danois étaient aussi de la partie pour la série US. Idem pour la musique grave et envoûtante, c'est le même compositeur.]
Mais commençons par le commencement.
Sarah Linden est mère d'un ado et inspecteur de police, section homicide. C'est son dernier jour de boulot. Bientôt, elle s'envolera pour la Californie pour épouser Rick. Un grand changement. Fini la pluie incessante de Seattle et les cadavres. Mais à quelques heures à peine de la fin de son service, son chef l'envoie sur une scène de crime: un vêtement féminin taché de sang a été retrouvé en pleine nature, mais pas trace de corps. Sarah, guidée par un flair hors du commun, se laissera malgré elle emporter dans cette enquête qui va très vite s'avérer extrêmement difficile, jonchées de fausses pistes et de vies brisées en cours de route.
The Killing commence et déjà, on remarque que le grain de l'image n'est pas celui auquel les américains nous ont habitué. Il s'agit en fait ici d'un grain d'image "à l'européenne". Vous avez sûrement dû noter cette différence en zappant par exemple des Experts à une série policière allemande. Les séries américaines ont en général une image extrêmement clean, parfois saturée de couleurs, presque aseptisée. Tandis que les séries européennes ont une image plus proche du réel, un peu comme si le tout était filmé par Tonton Charles avec sa caméra HD toute neuve. Du coup, ça rend la chose moins glam' et plus réaliste.
Et puis il y a cette ambiance. La pluie, encore et toujours. On sent presque l'humidité sur soi. Le ciel gris. Pas un rayon de soleil. On retrouvait ce même type d'ambiance dans le film "Seven", avec cette pluie constante et cette lumière basse et grise qui sappe tout espoir. Une lumière captée avec brio et utilisée judicieusement dans chaque scène. Il est clair que le Seattle de The Killing n'est pas le même, joyeux et lumineux, de Grey's Anatomy.
Et surtout il y a Sarah, une femme encore jeune, pas très jolie, sapée avec des pulls jacquards immondes qui ont l'air constemment humides, et qui semble souhaiter ce changement de vie, partir sous le soleil, épouser l'homme qu'elle aime, mais qui est aussi obsédée par ses enquêtes. Et celle-ci, la dernière, se complique et se ramifie de manière exponentielle, repoussant ce nouveau départ. A ses côtés, son remplaçant, Holder, un ancien flic des stup' en qui elle n'a que peu confiance, et qui tente de faire son nid pendant que celle qu'il devait remplacer semble la championne en ratage de vols à destination du soleil.
Joel Kinnaman (Holder) et Mireille Enos (Linden)
Entrent alors en scène la famille de la victime, et l'équipe d'un homme politique se battant pour être élu maire. Tout semble lié, mais par qui, comment, et pourquoi?
Michelle Forbes (Mitch Larsen) et Brent Sexton (Stan Larsen)
Les acteurs de The Killing sont tous simplement époustouflants. J'ai rarement vu une telle justesse de jeu, une telle subtilité dans un geste, un regard, une intonation de voix ou une simple posture. La détresse de certains personnages est telle qu'elle ne peut que vous toucher. Tous les membres du casting de cette série méritent tout simplement toutes les récompenses possibles et imaginables. Le plus incroyable étant que nous les avons presque tous vu dans d'autres séries sans jamais vraiment leur prêter d'attention.
Kristin Lehman (Gwen Eaton), Billy Campbell (Darren Richmond) et Eric Ladin (Jamie Wright)
Le scénario de The Killing est d'une richesse et d'une complexité incroyable. Bien sûr, on sent certaines petites choses venir, mais d'une manière générale, on se laisse facilement surprendre, et la série nous balade à gauche et à droite, joue avec nos nerfs, avec nos préjugés. Chaque épisode se conclu de la même façon: un cliffhanger monstrueux rythmé par une musique prenante et dramatique. Et à ce moment vous vous rendez compte que vous n'avez presque pas cligné des yeux pendant près de 50min, que vous serrez compulsivement une patte de votre chien dans votre main et que, d'un coup d'oeil, on comprend que oui, clairement, on enchaîne avec l'épisode suivant, même si il est passé minuit et qu'il faut aller bosser aux aurores demain.
En prime, la musique de Frank Bas (c'est apparemment la même pour la série originale danoise que pour l'américaine)